Toi le Forain...
Poème de N.Vuillin.Chabal
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Qui n'a jamais été amoureux ou amoureuse, dans son enfance ou son adolescence, d'une personne pour qui vous n'étiez qu'une ombre ou qui vous remarquait à peine. Les sentiments que l'on ressent alors ont quelque chose de magique, ils sont empreints d'innocence, de pudeur et vous semblent tellement fragiles alors! 
J'ai tenté mille fois d'écrire ce poème.
Mille fois j'ai laissé de côté ma plume et mon papier!
Pourquoi je n'ai jamais osé raconter cette histoire?
Peut-être par pudeur, par peur que ça te fâches.
Je vais te dévoiler ici un tout petit secret
Que je gardais pour moi depuis bien des années.
Surtout, ne souris pas et ne te moques pas:
C'est d'un sentiment pur que je veux te parler,
Un instant de magie  qui entrait dans ma vie.
Toi tu étais forain et moi j'étais foraine.
Pour tous ceux de notre âge on était des héros.
Notre vie était faite de musique, de lumière,
Amenant pour un mois un petit vent de folie
Au parfum de nougat et de barbe à papa,
On vendait du bonheur à qui en demandait.
Je voyait toutes ces filles qui te tournaient autour.
Je voyais les garçons me dévorer des yeux.
Mais qu'importe les autres, je ne voyais que toi.
Nos regards se croisaient et j'y voyais l'amour.
J'attendais impatiente la fin de la soirée.
L'heure de la fermeture doucement arrivait.
Le manège fermé: à nous la liberté!
Nous on vivait la nuit, le jour on travaillait.
Un soir où il y avait un bal sous chapiteau
Avec d'autres forains on a été dansé.
Ce soir là, souviens toi, t'es venu m'inviter.
Quand j'ai senti tes mains se poser sur ma taille
Une sensation étrange, inconnue jusqu'alors
Est venue m'envahir et secouer mon corps.
Mon coeur s'est affolé, il battait la chamade,
Mes jambes flageolaient, Dieu que j'étais heureuse!
Je sentais ta chaleur et j'aimais ton contact.
J'aurais aimé que tes bras m'enveloppent
Que tu dises les mots que je rêvais d'entendre.
L'orchestre nous jouait la chanson d'Hamilton
Comme j'ai toujours envie d'aimer en était les paroles.
C'est la première fois que j'étais amoureuse.
La chanson s'est finie, la magie est tombée.
Je me suis dit "Petite, arrête de rêver!
Tu l'intéresses pas, tu te fais des idées!"
Jusqu'à la fin de la fête pourtant j'ai espéré
Te voir venir vers moi, faire la premier pas.
Moi j'étais trop timide, j'aurai jamais osé!
Puis la fête a fini, on a du démonter,
Nous sommes reparti chacun de notre coté.
Toi, la saison finie, vers chez toi tu rentrais,
Sur les routes de France nous on est reparti.
Les mois passaient très vite, les fêtes se succédaient.
Quelques fois je t'ai vu mais tu m'as ignoré.
Peut-être que pour toi cet amour n'a jamais existé!
Moi, il m'a fait du bien, il m'a bien fait rêvé!
Amour d'adolescence, amour plein d'innocence
On ne commande pas l'amour, il vient juste comme ça
Mes cheveux ont blanchi, le temps passe trop vite.
Moi je me suis mariée, j'ai quatre grandes filles.
Et toi que deviens-tu, as-tu eu des enfants?
Souvent je pense à toi, je revois ton visage.
Je dois te remercier de m'avoir fait connaître
Ce sentiment d'amour, ces moments merveilleux.
Je garde ces instants au fond de ma mémoire
Dans mon jardin secret tout au fond de mon coeur
Ils sont source d'eau claire au milieu du désert.
Tu as, sans le savoir, sans un mot, sans rien faire,
Ouvert en moi la fenêtre du coeur qui donne sur l'amour
Et si le hasard fait que tu lises ces lignes
Tu te reconnaîtras, je ne dis pas ton nom.
le 1 er Octobre 2004