Assieds-toi à côté de
moi, j'ai à te parler.
Je t'ai, maintenant je le crois, assez écouté.
Je me souviens de notre rencontre, c'était
un jour où le soleil brillait, l'air était doux. Un parfum
de muguet, que je n'avais encore jamais respiré, se répandait
tout autour de nous. Tu es venu vers moi, tu semblais si fatigué,
si triste, que je me suis tout de suite sentis proche de toi. Les arbres,
les fleurs, l'herbe même sentaient la naissance, le début,
la fraîcheur.
Quand tu m'as pris dans tes bras, ton cœur
battait encore plus fort que le mien. Je me le rappelle bien, j'en étais
stupéfait!
Tu me donnais tant d'amour qu'il me semblait
que l'éternité était en nous, que ma vie était
elle.
Tu m'as connu bébé, je suis
maintenant beaucoup plus vieux que toi, au crépuscule de ma vie.
C'est moi maintenant qui suis fatigué,
si fatigué, éreinté. Je ne sens plus mes membres,
je ne sens presque plus rien. Il est pour moi l'heure d'avoir les réponses
à mes questions.
Es-tu beau? Es-tu laid?
Es-tu intelligent, idiot, maigre, gros, petit,
grand, noir, blanc, jaune, rouge, vert?
Es-tu riche, pauvre?
As-tu du goût? Comment t'habilles-tu?
Portes-tu du vert avec du bleu? Du marron avec du noir?
Non. Ne réponds pas à mes questions,
après tout, que m'importe?
Tu es ce que tu es, celui que j'ai aimé,
que j'ai toujours aimé. Le premier, le dernier.
Notre sort aurait pu être si différent…
le mien surtout.
J'aurais pu me retrouver seul, dans le froid,
attendant jusqu'à ma mort ton retour.
J'aurais pu me sentir abandonner mais confiant,
même si cela peut paraître incompatible.
J'aurais pu croire en un faux Dieu, perdre
ce que vous appelez des illusions.
Comme je me sens bien près de toi…
il me semble sentir à nouveau le muguet comme ce jour de mai; je
sens ta chaleur, ta vie, il me semble même entendre battre ton cœur,
comme au premier jour.
Pour moi, c'est le dernier. Ne pleure pas
mon ami. Ton tour viendra, et je ne peux m'empêcher de te promettre
que je t'attendrais, même si je sais que tu ne crois pas à
ces choses là.
Que nous reste t'il donc?
Rien d'autre que ce que tu penses être
un faux espoir.
Mais tu en sais sans doute plus que moi sur
ce sujet?
Je vais continuer de vivre dans ton cœur,
aussi longtemps que tu le souhaiteras. Je serais toujours tout près
de toi, tant que mon image sera présente en toi.
Je dois maintenant m'arrêter.
S'il te plait…
Poses ta main sur ma tête… caresses-moi.
Je vais partir, et j'ai un peu peur. Il me faut ton odeur…
Adieu.
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D'un chien à son
ami de maître.
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